Revue hebdomadaire sur Internet Fusionne, dirige, écrit et correspond : Menassa 2002 NOUS
NE SAVONS PAS PARLER NOUS LE FAISONS EN PLUSIEURS LANGUES: INDIO
GRIS, EST LE PRODUIT D´UNE FUSION INDIO GRIS Nº 104 AÑO II ÉDITORIAL ENTRETIEN
AVEC LE POÈTE MIGUEL OSCAR MENASSA Miguel
Oscar Menassa : Quand
j’ai écrit le livre Moi pêcheur je ne pensais absolument
pas que j’allais être un exilé ; à ce moment-là il était
impossible de penser que la « Grèce moderne » qu’était
alors Buenos Aires, en arrive à être réduite à une dictature
militaire sans précédents en Amérique Latine. Ce qui se passe,
c’est que nous sommes si fanfarons nous, les Argentins, qu’on ne
parle jamais bien de nous. Il y a eu 30.000 disparus et on n’y a pas
attaché d’importance , comme si il n’y avait pas eu de morts. Cette
guerre fut une guerre très sale guerre, une guerre très forte.. Carmen
Salamanca :Vous
dites aussi quelque chose comme ça dans El Indio… Vous dites que les
Argentins, après, n’ont
pas parlé de la dictature. MOM :
Vous savez pourquoi je vous dis ça ? Parce qu’en Espagne non
plus on n’a pas parlé de la dictature franquiste, alors maintenant
nous en pâtissons. Tout ce que les peuples n’élaborent pas, ne
s’oublie pas. On dirait qu’on oublie mais en fait on en pâtit.
Aujourd’hui encore, en Espagne, nos esprits sont des esprits de la
dictature. Comme le dit le poète: «Elle
veut m’assassiner, elle me maintient dans des phrases antérieures». Vous,
si vous écoutez bien la radio, la télévision, vous verrez qu’il y a
beaucoup de phrases qui -pourrait-on dire- sont de Franco, tout au moins
de la dictature franquiste. N’importe où, à la Cour Suprême, dans les ministères, dans les équipes de
football, à l’Université…Là c’est un peu lamentable. Ce
qui se passe c’est que cela est très dur pour moi. Pour moi et pour
ma génération, ça a été très dur parce que nous avions vécu une
époque impensable en Amérique Latine. Moi, par exemple, pendant j’ai
étudié à la faculté de médecine pendant 7 ans et quatre professeurs
de mes professeurs étaient des Prix Nobel. Quand je dis la « Grèce
moderne» c’est parce que tout le monde aimait converser. Après, tout
s’est un peu détérioré. Nous étions les nouveaux Grecs, c’est
pour ça qu’ils ont dû faire ce qu’ils ont fait. Vous savez que
pour le capitalisme, l’important ce n’est pas de tuer une personne
qui casse ou qui tue, pour le capitalisme, c’est important de tuer les
gens qui parlent. CS :
Tuer les gens qui parlent… MOM :
Tuer un terroriste, tout le monde est
d’accord. Pour produire un autre terroriste on doit travailler
toute la vie. Par contre, une personne qui parle, une personne qui ne
veut pas tuer, est dangereuse parce qu’à la fin ce sont ces gens-là
qui finissent par être contre la guerre, des personnes comme nous, qui
aiment converser. Ce sont des personnes que les états modernes préfèrent
faire taire pour qu’elles ne mettent pas le nez dans leurs affaires.
Vous savez que la guerre en soi n’existe pas, c’est-à-dire qu’un
pays fasse quelque chose à un autre pays, ça, ça n’existe plus. Je
ne sais pas si ça a même existé un jour. Ce qui existe c’est
l’industrie des armes, la contrebande d’armes. Il faut développer
l’économie ? Une petite guerre, surtout pour les pays
producteurs (lisez les États-Unis), c’est une affaire. N’importe
quelle petite guerre de merde fait augmenter le PIB, le PAB et le POB. Je
dis ça parce que nous, pour pouvoir augmenter quelque chose dans notre
vie, nous devons travailler comme des bêtes, eux par contre , ils
font une petite guerre et tout augmente. Ce qui baisse, ce sont
les produits qu’ils n’ont pas, le pétrole, lui,
augmente et le PIR, la production d’armes augmente…En plus,
aucun gouvernement actuel, et encore
moins le gouvernement des Etats-Unis, ne veut que ses citoyens soient
cultivés, intelligents, studieux. Les guerres servent à ça, quand il
y a une guerre, le président des États Unis propose au Congrès
n’importe quelle énormité et on l’ accepte. D’où sortent-ils
l’argent ? De la culture et de l’éducation. Ce n’est pas que
j’ai un espion à la Maison Blanche. C’est paru dans tous les
journaux. Ce
qui se passe c’est que les gens se rendent compte et ne se rendent pas
compte. C’est comme quand on découvre que son propre père était un
délinquant :on le croit mais on ne le croit pas, on le croit mais
on lui trouve des excuses. On dit : « Pauvre Papa…Je n’ai
pas étudié comme il aurait aimé que j’étudie et il a dû se mettre
à voler ». C’est possible mais… CS :
Dans le livre vous donnez la sensation de venir d’une culture très
différente… MOM :
Elle était différente mais pas tant que ça. L’Espagne sortait de la
dictature et les Espagnols avait le cerveau comme celui des Argentins
maintenant, c’est-à-dire un cerveau un peu bizarre. Selon mon critère,
par exemple, pour les psychanalystes argentins les choses ne vont pas
bien . Le seul groupe pour lequel les choses vont bien à Buenos Aires,
c’est le Grupo Cero. Mais c’est parce que les psychanalystes
lacaniens ont été les continuateurs de la dictature, au niveau de la
pensée. Ils ont occupé toutes les chaires, tout l’enseignement de la
psychanalyse et quand la dictature a pris fin,
ils ont continué à faire la même chose que pendant la
dictature. À la faculté, aux examens de psychanalyse…ils ont continué
à le faire aussi, c’est-à-dire que c’est eux qui
soutenaient la dictature après que la dictature soit finie. Après on
les a puni. Comment va-t-on se psychanalyser avec des gens qui, après
que la dictature soit renversée, continuent à maintenir au niveau de
la pensée les mêmes caractéristiques que durant la dictature. Le
monde est vraiment dérisoire. Une fois j’ai rencontré dans la rue un
lacanien argentin et il s’est beaucoup plaint de l’Espagne. Je lui
ai dit : « Pourquoi tu ne retournes pas à Buenos Aires toi
qui as ta famille là-bas ? » Tu sais ce qu’il m’a répondu ? Il m’a dit :
«Non, parce que si je vais à Buenos Aires, je perdrai beaucoup de
prestige. C’est-à-dire que pour ne pas perdre de prestige, il
souffrait ici comme un damné. En
1985, je suis allé en Argentine pour étudier l’Argentine et pour
voir si je pouvais y rester. J’ai décidé que l’Espagne me plaisait
beaucoup et qu’en Argentine je n’allais pas pouvoir faire tout ce
que je faisais ici. Ça c’est autre chose. Moi, si je vais à Buenos
Aires, mon prestige augmente. Pourquoi ? Parce que laisser quelque
chose d’aussi important que ce que j’ai à Madrid et aller à Buenos
Aires serait considéré comme
un geste d’amour. C’est pour ça que ça me semble toujours bizarre lorsque les gens prennent l’argent comme excuse pour ne pas être ce qu’ils doivent être. On doit être ce que l’on doit être et peu importe si c’est avec de l’argent ou sans argent. C’est vrai qu’avec de l’argent c’est beaucoup plus facile, mais sans argent, si on a envie, ça se fait aussi, bien qu’un peu plus difficilement. Mais il est vrai aussi que si on doit , c’est-à-dire que dans sa vie on est celui qui doit comprendre (cela arrive dans certaines communautés), on doit comprendre. Moi, je devais comprendre, alors je me suis trempé comme un métal dans les scènes dures de la vie. Un homme qui devait comprendre devait savoir qu’il existait des scènes dures, presque mortelles, mais que l’on survit. Je navigue et, naviguer, ne suffit pas. Ensuite il faut continuer d’autres paroles. CHÉRIE: Je suis en train d’écrire à genoux sur mon lit, plus qu’en train d’écrire, me dis-je, en train de prier. Dieux nocturnes, dieux de la perdition. Venez, emportez-moi avec vous, vers la tiède folie des ombres. Je ne veux pas voir au-delà de la lumière, je veux voir au-delà de ma mort. Parmi les ombres, me diront les plus sages, au-delà de ta mort , la vie continue. Paroles, bêtises, en vérité, je veux voir au-delà de la lumière. Parmi les hommes, au-delà de tout aveuglement, fermer les yeux un instant et voir l’univers, l’immensité de tous les espaces, le cosmos, les petites fissures par lesquelles mon écriture pourra être du temps son futur.
Il me l’a dit très clairement: -
Elle croit que je travaille parce que ça me plaît et elle a un peu
raison mais je dois reconnaître que moi aussi ça me dérange
d’arriver tard à la maison et de la trouver endormie. Moi je ne lui ai rien dit, tout en
pensant : « Revue orale, la voix pour que tes matins soient
différents». Il s’est mouché et comme il ne
parlait plus je lui ai dit: -
Nous continuons la prochaine fois. Avant de se lever
du divan, il a réussi à dire: -
Comment peut-on faire ce que l’on ne
connaît pas, si ce n’est en rectifiant les erreurs qui doivent, forcément,
se produire?
Elle dort , maintenant, un livre entre les
jambes et tout en dormant elle sourit et en souriant elle m’excite. Je la déshabillerai peu à peu et je la baiserai endormie ; elle, ne se rendant compte de rien, jouira sûrement plus que jamais.
1 Parfois, la folie est, simplement, l’exagération d’une phrase, la plupart du temps, normale. 2 Un coup de hasard peut altérer le jeu de la vie pour toujours. Tout enfoncer ou tout signifier comme triomphe. 3 Nous sommes déjà en train de comprendre une des limites : la vérité est toujours une construction théorique. 4 Il
n’y a rien dans la vie d’un sujet qui l’oblige à jouir.
La réalité me
montre de manière cruelle qu’il y a certaines situations de douleur
qui n’ont pas encore commencé. Maintenant
je dois abandonner le désir d’avoir toujours le rôle principal,
abandonner la tendance à me distinguer et quand je me transformerai en
quelque chose de précieux seulement pour quelques-uns et non pour tous,
là, je serai une marchandise suffisamment chère comme pour survivre à
la poésie. Nous
avons déjà dépassé le temps de la survie, amoureuse de la mort.
Vient maintenant le temps de la vie, sans douleur, Menassa, sans
passions entrecoupées. Relations
multiples et fragrantes, même s’il est nécessaire de tous les
tromper. Relations multiples comme l’unique possibilité de survivre
à ce projet délirant qu’est vivre. Sans douleurs, sans culpabilités, chacun se jettera du haut de son propre toboggan et avec ce qui restera de chacun après la chute, nous serons un groupe, sans douleurs, sans culpabilité, sans remords. Indio Gris ÇA C ‘EST DE LA PUBLICITÉ PLEURS
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